Le déroulement d’une cérémonie sacrificielle

Les sacrifices avaient généralement lieu dans la cité, au sein d’une enceinte sacrée dans laquelle se trouvait un temple. On pratiquait souvent le sacrifice en haut d’une pyramide, qui reproduisait la forme des montagnes et permettait ainsi de rapproche le ciel et la terre, en vue de se rapprocher du dieu qui résidait dans le temple, symbole de la caverne des dieux. Les lieux de culte étant variés, on sacrifiait également dans d’autres sites sacrés, dépendants des circonstances. Le sacrifice pouvait tout aussi bien avoir lieu sur un terrain de jeu de balle, dans une lagune, dans les montagnes, sur des chemins ou encore sur un champ de bataille. De très nombreux sacrifices étaient néanmoins pratiqués dans l’enceinte sacrée du Templo Mayor de Tenochtitlan, considéré par les Aztèques comme le centre du monde. La cérémonie sacrificielle se déroulait en public.

Avant de pratiquer le sacrifice à proprement parler, des rites d’entrée se déroulaient : il s’agissait de « jeux » pré-sacrificiels visant à épuiser la victime avant la mise à mort.

Tout d’abord, lors de la veille rituelle, la victime était contrainte à danser et chanter à la fois à l’extérieur, dans les quartiers de la ville, mais aussi au temple où elle chantait des hymnes au dieu auquel elle allait être sacrifiée. La veille se déroulait au temple. Le sacrifié devait aussi jeûner pendant quatre jours et absorber des substances enivrantes et stupéfiantes, par exemple des haricots rouges hallucinogènes. Elle inhalait aussi des herbes aromatiques obnubilantes, tout ceci dans des rythmes de flûtes et de tambours. Ce procédé s’appelait un « marathon ludique », et la victime devait en sortir dans un état d’épuisement total.

Le sacrifié participait à un certain nombre de jeux avant la mise à mort, toujours dans le but d’un épuisement total. Les jeux érotiques visaient à épuiser le potentiel sensuel et sexuel : le sacrifiant pouvait offrir au sacrifié une courtisane destinée à l’épuiser, dans les vingt jours qui précédaient la mise à mort. La victime participait aussi à des jeux guerriers dans lesquels une bataille était mimée, dans le but d’arriver à un épuisement musculaire total. Enfin, le sacrifié participait aux jeux de balle, appelés tlachtli, qui étaient une longue tradition mésoaméricaine : la balle représentait le Soleil, et les deux équipes adverses représentaient son mouvement en combat perpétuel contre la Lune.

Enfin avaient lieu certaines tortures pré-sacrificielles. L’arrachage des ongles à vif était destiné aux enfants sacrifiés à Tlaloc, dieu de la pluie. Les ongles étaient une offrande préalable, tandis que les pleurs des enfants représentaient la pluie attendue. Des crémations étaient offertes au dieu Huitzilopochtli : les prêtres lançaient des corps dans un brasier en haut du temple, et les laissaient brûler un moment. Ils attendaient que la chair se boursoufle, dégageant une fumée qui réjouissait la foule et atteignait le dieu, puis ils retiraient les corps des victimes encore vivantes pour ensuite les mettre à mort. Le dernier type de torture sacrificielle était la torture ludique active, appelée « Gladiatorio » : des guerriers accomplis devaient s’affronter aux captifs promis au sacrifice. L’affrontement était présidé par Xipe Totec, dieu du renouveau. Lorsque la victime défaillait, le prêtre procédait à la mise à mort.

Pour en savoir plus sur les différentes techniques de mise à mort, je vous invite à consulter cet article.

Après la mise à mort, la fin de la cérémonie sacrificielle était marquée par les rites de sortie, qui consistaient à partager le corps du sacrifié. Le sang et le cœur étaient déposés dans un réceptacle à offrande, pour que le dieu puisse les manger. Dans certains cas, le cœur était mangé par le prêtre. La tête était offerte à la société : elle était empalée sur un tzompantli (ce qui signifie « le lieu du scalp » ou « le mur des crânes »), jusqu’à sa désincarnation complète et son dessèchement. Les tzompantli étaient des  offrandes permanentes aux dieux, mais pouvaient aussi faire office de menace sur les ennemis. Le sacrifié était ensuite écorché, et les élèves des écoles militaires pouvaient éventuellement s’affronter au nom de Xipe Totec (aussi appelé « Notre Seigneur l’Ecorché ») en ayant revêtu la peau encore sanglante des sacrifiés. L’issue du combat se soldait par un nouveau sacrifice. Le maître des sacrifiés pouvait également revêtir la peau du sacrifié, qui guérirait les maladies de peau. Enfin, la chair du sacrifié était réservée à certaines personnes : les cuisses étaient réservées à l’empereur, par exemple, et d’autres parties du corps pouvaient être données à manger à des animaux en captivité (tels que le jaguar ou le serpent) qui représentaient des divinités.

Sources :

Le sacrifice, fondateur de civilisation et d’induation par Pierre Solié

– Le sacrifice humain chez les Aztèques par Michel Graulich

Mathilde PRADE